Les naufragés du train 5272, ou "quand il n'y en a plus il y en a encore"

Cet article aurait pu s'appeler "les naufragés du rail" mais c'est un titre souvent prit et reprit dans de nombreux récits d'aventures du rail. J'ai décidé finalement de choisir le titre ci dessus, car il est suffisamment évocateur sur le contenu du récit que je vais vous faire.

 

Lors d'un voyage professionnel, j'ai traversé la France de Rennes, où j'effectuais une exposition, pour revenir à Mulhouse, mon lieu de vie et travail.

Les billets initialement réservés prévoyaient un départ de Rennes à 9h25, puis une première correspondance à la gare de "l'Aéroport Charles-de-Gaulle TGV" entre 12h37 et 12h50, pour un second TGV jusqu'à Strasbourg, où une seconde correspondance me permettait d'atteindre Mulhouse à 16h30 ; ce trajet de 7h05 de Rennes à Mulhouse devait rester simple.

 

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Le cas idéal étant exposé, voici ci-dessous, ce qu'il s'est réellement déroulé lors de cette journée du Vendredi 30 Septembre 2011.

 

 

 

Je me rend donc à la gare de Rennes, où mon TGV 5272 quitte la gare à 9h25, comme convenu. Mais, pour rendre plus gai la "vie à bord" des passagers et éviter la monotonie, ce TGV effectua de nombreux "arrêts en plein voie" ainsi que des marches lentes, notamment pour le franchissement d'un passage à niveau défectueux peu avant la gare du Mans.

Ces évènements font prendre à notre train environ 15 minutes de retard. La correspondance de 17 minutes en gare de "Charles-De-Gaulle TGV" était donc impossible à maintenir (la SNCF ne voulant pas mettre en retard un second train pour une "poignée de clients". Je vais trouver le contrôleur pour lui expliquer mon cas, il se trouve qu'une vingtaine de voyageurs sont dans le même cas que moi. Ce contrôleur m'informe qu'une solution sera étudiée par le personnel. afin d'organiser la suite de notre voyage.

Peu avant l'arrivée à la gare de" Marne-La-Vallée TGV", le personnel nous informe que les voyageurs à destination des gares desservies par la LGV-Est doivent descendre au prochain arrêt (Marne-La-Vallée TGV) et qu'une prise en charge sera proposée aux voyageurs. Nous arrivons en gare de "Marne-La-Vallée TGV", au pays de Mickey, à 12h40. Sur le quai il n'y a aucune prise en charge par le personnel. En réalité cette gare est petite, et il doit y avoir maximum 5 ou 6 membres de personnel présent sur place, et aucun n'avait été dépêché sur le quais pour aider les voyageurs, complètement livrés à eux-mêmes, dans une gare où ils n'avaient même pas à se trouver ! Il fallu se rendre aux guichets pour apprendre de quelle façon nous finirions notre voyage.

 

 

 

Jusqu'à ce moment là, nous pensions que le TGV que nous devions emprunter (TGV 5402) ferait un arrêt exceptionnel dans cette gare afin de nous prendre en charge et retrouver nos places. Nous nous sommes trompés en beauté ! En réalité ce TGV ne passant pas par cette gare, le personnel nous a proposé le prochain train pour Strasbourg : le TGV 5443 partant à 14h43 et arrivant à Strasbourg à 17h10. Admettons, cette gare est petite, peu de correspondances sont assurés dans cette gare. nous prendrons notre mal en patience. Nous nous rassurons en nous disant que cela aurait pu être bien pire (pas de correspondances par exemple), deux heures, on se balade et ça passera.

 

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Des agents se débrouillent pour nous trouver de nouveaux trains, et des places dans ces trains. les premières personnes obtiennent des places, tandis que pour les suivantes, le train est complet. On se voit remettre des billets où il est indiqué "01 place selon disponibilité" ceci implique de s'assoir sur des strapontins, de rester debout, ou, d'utiliser une place normalement réservée, en laissant la priorité aux personnes munis d'une réservation pour cette place. (c'est une situation un peu désagréable, surtout sur 2h30 de trajet…)

 

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En quittant le guichet, un agent nous remet à chacun une "boite-repas". Cette boite magnifiquement décorée de rouge, et ornée du logo SNCF contient quelques victuailles, telles que quelques biscottes, du pâté, des céréales, … ainsi qu'une petite bouteille d'eau. En quittant le guichet cet agent me regarde et me souhaite "un bon courage pour la suite de mon voyage". Suite à quoi, je n'ai pu lui dire, qu'avec un regard blasé - fatigué - las : "Merci, nous en auront besoin . . .".

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A cet instant précis, on se dit "ça y est, nous nous sommes échoués on ne sait pas où", et une fois la distribution terminée, les agents nous abandonnent. A cet instant une seule chose m'est venu à l'esprit : "nous sommes des naufragés", "les naufragés du train 5272". Et c'est exactement ce que nous étions.

En attendant le départ du train, je me balade un peu, "tient, mais oui, nous sommes réellement en plein Disney-land ! le village Disney est juste à coté de la gare !" J'attends,

J'attends encore,

Et encore,

Et encore un peu …

Un peu plus loin, je retrouve des naufragés, comme moi, et entre naufragés, des liens se tissent ! On se comprend, on essaye de s'épauler (à défaut d'une prise en charge correcte par la SNCF). On s'occupe en racontant quelques anecdotes. Bref il est bientôt l'heure. Et là…

 

 



Car un malheur n'arrive jamais seul, appelez cela comme vous voulez, loi des séries, loi de Murphy, manque de chance, ou peut être problème de coordination à la SNCF, le second TGV dit de "secours" accuse un retard annoncé en gare de 20 minutes. Il est en réalité en retard de 25 minutes, d'après le site d'Infolignes. Ce contretemps nous fait modifier nos prévisions de correspondances à Strasbourg ! En effet ce TGV 5443 devait partir à 14h43 de "Marne-La-Vallée TGV" et arriver à Strasbourg à 17h10. Disons que pour le moment le plus urgent était d'attraper ce 5443, pour la correspondance à Strasbourg, nous verrions plus tard.

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15h05 : le TGV arrive en gare. Il en repart avec environ 25 minutes de retard sur l'horaire prévu. Et comme annoncé, ce TGV est complet, on essaye donc de se trouver des places dans la rame. Un point positif est que le placement pouvait se faire dans tout le train, y compris en 1ere classe. Je me pose d'abord sur un strapontin, puis, par chance je trouve une place en 1ere classe ; je m'y suis donc installé. Et bien le TGV en première, c'est pas mal, les appuie-têtes sont très confortables, on a de la place pour les jambes, et des prises électriques qui fonctionnent ! Mais du coup, j'ai quitté mes amis naufragés. Cependant après la gare de "Lorraine TGV", vers 16h, le train est direct jusqu'à Strasbourg, et il s'était un peu vidé, je suis donc retourné au près de ces derniers pour continuer la longue discussion qui avait commencé le matin à 9h30 environ.

 

Nous arrivons, enfin, en gare de Strasbourg à 17h35, on se dit "Enfin, on y est bientôt", et étant malheureusement un habité de ce genre de situation, je dis qu'il ne faut surtout pas se réjouir trop vite, une situation critique peut encore se produire, nous ne sommes encore pas arrivés ! Et, évidement, encore une fois, peut être la loi des série, ou j'en sais rien : nouvelle péripétie ! A croire que nous n'avions encore pas suffisamment souffert !

 

 

Nous trouvons un train pour se rendre respectivement à Mulhouse et à Bale. C'est un TER 200. On s'installe sur le quai déjà bondé, le train arrive, lui aussi bondé. Déjà : mauvais pressentiment, on se dit qu'il va y avoir un problème, on commence à faire la file d'attente, on y est presque dans ce wagon, mais ça n'avance plus ! Là, un agent SNCF nous conseille (ordonne) d'aller à l'avant du train, car il y a de la place. Bon, on se dit, "de toute façon on n'est pas dans le train, on n'a rien a perdre à essayer", et pendant le laps de temps où nous remontons la rame, la personne responsable du départ du train ordonne au mécanicien de faire marche, nous étions encore sur le quai avec une cinquantaine de passagers !!! Cette responsable se justifiant du départ du train simplement en regardant sa montre !

A bout de nerf, et étant la deuxième "rupture de correspondance" je décide d'aller m'expliquer avec cette responsable. Globalement rien n'est ressorti des explications juste que c'est pas de leur faute, et que les voyageurs n'ont qu'à pas être aussi nombreux. Disons que cela me fait "gentiment" sourire, bref.

A ce moment, si vous voulez, il n'y a plus que l'humour, même noir, pour détendre un peu l'atmosphère. Les nerf à vifs, des agents incapable de mettre à disposition un matériel adapté à l'affluence des voyageurs, toutes les conditions sont réunis pour passer un mauvais moment.

Je me calme un peu et je demande des explications, fourni par cette même personne puis par ses collaborateurs de l'autre coté du quai :

< Cela fait plusieurs années que le vendredi soir ce train en particulier est bondé. Il manque entre 2 et 4 voitures sur ce train. Cependant, {arguments économiques, etc etc} il n'est pas possible d'ajouter temporairement des wagons à se train, l'entreprise préfère faire naviguer plus de petits trains que quelques gros trains. >

 

Pour vous dire, j'ai même essayé de négocier un café offert par la SNCF pour cette seconde rupture de correspondance mais, rien à faire, le personnel résiste. Na…

 

 

 

 

18h21 : le train international numéro 97 arrive en gare de Strasbourg, destination Zurich, et il dessert Mulhouse et Bâle, parfait ! Cependant, mêmes problèmes que pour le train précédent, autour des wagons de seconde classe une masse de personnes tente de monter dans les voitures. Ayant déjà vécu cela 30 minutes auparavant, je m'exclame haut et fort : "y'en a marre on va en première !" Sur nos nouveaux billets régénérés lors de notre naufrage en gare de "Marne-La-Vallée TGV" nous avions la possibilité de terminer notre voyage en 1ere classe, ce que nous avons fait, et heureusement, car encore une fois, je ne suis pas sur que tout le monde ai pu monter ! Après coup, d'autres personnes sont également montées en première, les plateformes ainsi que les secondes classes étaient sur-saturées.

 

Malgré tout cela, ce train a desservit la gare de Mulhouse à l'heure, j'y suis donc arrivé à 19h22, soit un retard de près de 3 heures sur l'horaire initialement prévu (si vous ne vous souvenez plus du planning d'origine, remontez tout en haut, j'ai marqué le cas "idéal"). j'arrive enfin chez moi à 19h45, soit près de 12h après avoir quitté mon hôtel ce matin, et, ces 12 heures, je les aient passées dans les transports en commun, et pour une grosse partie à faire face aux nombreuses incompétences de notre entreprise nationale de transport de voyageurs par le rail.

 

 

"Chers naufragés du train 5272, nous vous prions d'accepter nos excuses pour l'incompétence dont nous faisons preuve."

(Tant en matière de gestion du trafic, que dans l'accompagnement des voyageurs, dans les trains, sur les quais et globalement dans la gare.)

 

 

 

Après courte réflexion, une autre possibilité aurait consisté à proposer aux voyageurs de rallier la gare de Paris-Est par le RER, puis d'emprunter une des nombreuses liaisons vers Strasbourg, puis vers Mulhouse. Calculé ce soir, en tenant compte des retard, cela nous aurait fait arriver à Mulhouse à 17h27 grâce au TGV Lyria 9217, et à Bâle à 17h56, soit près de 2 heures avant la solution proposée par la SNCF. Encore une fois, cette situation critique n'a pas été gérée de la meilleure façon que ce soit, ce qui est malheureusement trop souvent le cas au sein de ce réseau …

 

 

Petite note : Heureusement que nous étions plusieurs naufragés, nous avons pu nous soutenir, discuter et faire passer le temps ensemble, aussi bien en attendant le train en gare, qu'à bord durant le trajet, et ce, durant toute la journée. Cela nous a permis également de faire de nouvelles rencontres, fortes intéressantes.

Cependant je n'irai pas jusqu'à remercier la SNCF, faut pas pousser le bouchon trop loin non plus (Maurice) !!

Edition du 03 Octobre 2011 : Voir ce qu'est le "syndrome SNCF"

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Commentaires

1. Le lundi 3 octobre 2011, 07:49 par Tristan

Ils ont dit "poignée de clients" ?
J'aime bien le "bon courage pour la suite".
J'aime bien aussi la tension qui se dégage de ton texte à la fin ...

2. Le lundi 7 mai 2012, 18:09 par vince

Faut dire que le 5443 n'est jamais à l'heure moi qui le prend tout les vendredi à St Pierre Des Corps.... il à toujours +15 ou voir +20...

Alors j'aime bien le moment du Ter200 ! il faut dire que maintenant les rame ne font plus 8 voitures mais 10 (aux heures de pointes)... et les ter200 ne font plus Nancy/Bâle donc un peux moi blinder ^^.

Et pour le 97 c'est une habitude toujours en retard ! (petite anecdote : quand il a 5min de retard on peut dire qu'il est en avance :p)

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